Elèves atypiques

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A l’aide du tutorat une aide individuelle peut être apportée aux élèves en difficultés. Il arrive souvent que ceux-ci présentent certaines particularités de fonctionnement (et donc d’apprentissage). De par leurs parcours personnels et au sein de l’établissement certains professeurs ont développé des champs d’expertise relatives qui peuvent être utilisés dans des circonstances spécifiques. Il est de mon sentiment personnel que connaître les différents profils possibles d’élèves et les champs de compétence des collègues peut dans bien de circonstances permettre de faire des appariements plus productifs que si ceux-ci sont fait de manière plus ou moins aléatoires.

A titre personnel j’ai été propulsé référent élèves intellectuellement précoces en 2014 et j’ai depuis au travers de lectures et de nombreux entretiens pu développer un semblant d’aisance pour aborder les élèves présentant ce profil complexe.

Cette page a plusieurs buts :

  • présenter les différents profils d’EIP
  • présenter l’offre d’aide actuellement répertoriée dans le corps professoral du lycée pour aider les élèves en difficultés présentant des items associés aux profils décrits aux points précédents.
  • faire un appel à la participation pour pouvoir compléter la page en me proposant vos descriptions d’autres profils (dys, TDHA, ….) , et éventuellement de proposer vos services en  décrivant les compétences ou la philosophie que vous utilisez pour aider les élèves concernés par ces problématiques.

Descriptions du profil EIP

Déjà il n’y a pas un profil unique mais on peut distinguer des tendances lourdes ayant fortement tendance à s’accumuler.

Diagnostic

Techniquement le diagnostic d’EIP est délivrable par un psychologue au travers d’un test de QI. La barre a été fixée à 130 de QI, et pour beaucoup de psy l’évaluation s’arrête là. Heureusement d’autres complètent cette évaluation à l’aide d’un test de personnalité. Les  EIP ayant tendance à voir s’ajouter à leur spécificité certaines particularités de développements  (dys et autres)  et ces dernières ayant tendance à impacter négativement la mesure de QI et donc à brouiller l’évaluation, un tel complément d’information est bienvenue.

A mon avis, fixer notre attention sur la mesure de QI c’est un peu regarder le doigt qui pointe la lune. et limite à confondre cause et conséquence.

Signes

Dans cette partie vous allez trouver une liste de signes permettant de différencier l’EIP, mais aussi de comprendre ce qui se cache derrière ces manifestations. Ils ne sont pas les seuls à présenter ces particularités, mais ont tendance à les manifester avec plus d’intensité et en plus grand nombre.

L’EIP en plus de la problématique lié à cette catégorie se place au confluent d’une personnalité propre, d’une éducation, et d’autres facteurs environnementaux. Sociabilisé, il pourra masquer certains signes.

Ces indications laissent deviner un portrait cérébral/émotionnel, intime en quelque sorte, qui est central, il me semble plus important de connaître cette source que d’apprendre une liste de dommages collatéraux. ”

  • Grande créativité (souvent liée à des associations/téléscopages d’idées surprenantes)
  • Pensée en arborescence (sorte de corollaire de la créativité explosive). C’est un point mis en avant dans toute la littérature sur les EIP mais qui souvent n’est pas accompagné d’une explication très claire. Elle correspond à une tendance à voir se superposer dans leur esprit le fourmillement des possibles, souvent au même niveau du plus absurde au plus fin. Cette superposition peut être visuelle ou non, en 3D ou non. ça peut donner une masse confuse d’information ou quelque chose de plus organisé, des fois ça se manifeste par un défilé rapide, pour d’autres personnes une idée fulgurante va émerger et éclipser toute les autres. Le problème pour beaucoup d’EIP n’est pas le nombre d’idées mais l’absence de hiérarchie, tout est possible, tout est égal, pas vraiment connecté par une logique interne. Devant la nuée des sens possibles, il apprend à naviguer à l’instinct, à sentir la vérité/solution et peine souvent à extirper du labyrinthe de ses pensées un raisonnement permettant d’aller du connu à la solution qu’il a senti. Apprendre à se plier à la démarche laborieuse de l’argumentation (sans se départir de l’intuition) est un challenge de taille pour lequel il a souvent besoin d’aide.
  • Grande curiosité
  • Regard décalé sur le monde (l’explosion de la créativité est aussi une explosion de points de vue).
  • Nul par à sa place (ne comprend pas les autres, et les autres ne le comprennent pas), l’enfant EIP aura tendance à chercher la compagnie de personnes en dehors de sa classe d’âge, mais son développement peut être fulgurant dans certaines dimensions et avorté dans d’autres. Il a beau jouer au petit adulte il est en bien des endroits un enfant de son âge et même des fois immatures pour son âge.
  • Une conscience particulièrement aigue de l’absurdité de l’existence et du monde dans lequel il évolue. En réaction il y a souvent une recherche urgente d’ordre et de sens, ce qui s’accompagne d’un sens aigu de la justice. En cas de désintégration, ça peut virer au nihilisme ou au dogmatisme/fanatisme. Les réponses toutes faites, sans grande profondeur, auront tendance à le faire enrager (l’adulte est-il condescendant ou stupide ?)
  • Grande tendance à l’empathie. Des fois en réaction au coût d’un tel ressenti beaucoup d’EIP s’anesthésient émotionnellement.
  • Exigences extrêmes envers eux même et les autres. Se prennent pour leurs résultats scolaires et donc peuvent être anéantis quand ceux-ci ne sont plus à la hauteur.
  • Devant sa difficulté à trouver sa place dans un groupe dont les codes le dépassent, suivant les critères de comparaison utilisés, il peut se placer tout en haut ou tout en bas de la pyramide, dans une position intenable : complexe de supériorité/ d’infériorité. Héros ou Zéro. Il aura tendance à être aussi dans un jugement impitoyable du monde, cherchant perpétuellement la faille en lui-même et autour de lui.

En ce qui me concerne, le fil directeur est une sensibilité exacerbée qui a tendance à rendre la vie douloureuse et compliquée. Pour supporter l’intensité du ressenti et l’angoisse provoquée par un monde imprévisible et un peu fou, l’enfant aura tendance à sur-intellectualiser le monde, à lui chercher du sens et des règles transcendantes (quand il croit les trouver il peut devenir psychorigide et rien catégorique/expéditif). Du coup il gamberge, il perd sa spontanéité.

Si le professeur peut deviner que l’élève est EIP, un tel diagnostic ne peut être confirmé que par un psychologue. Cependant tout élève quel que soit son étiquette a le droit s’il en a besoin à un tutorat. Confrontés à des élèves non EIP le professeur peut développer des compétences qui seront utiles pour aider les EIP et vice versa. Le dispositif d’aide aux EIP peut tout à fait recevoir et aider des EIP-adjacents.

Force et faiblesse du diagnostic

Beaucoup d’élèves peuvent trouver un réconfort dans leur diagnostic quand le psychologue sait trouver les mots pour expliquer ses particularités, et permet à l’enfant de se voir quelque part dans l’éventail des possibles d’une humanité très diverses. C’est d’autant plus vrai quand le diagnostic diminue l’angoisse parentale et que l’élève sait qu’il y a toute une partie de la population qui fonctionne comme lui.

Mon impression c’est que s’il y a beaucoup de très bons psychologues, il y en a aussi pas mal d’autres qui font un travail assez médiocre pour décortiquer et accompagner. Des fois ce n’est pas nécessairement de leur faute car une fois le diagnostic établi les familles ne permettent pas au professionnel d’assurer un suivi. Ça coûte de l’argent et ça prend du temps. Les psy ont des spécialités, des points forts, et il vaut mieux en choisir un qui ait l’habitude d’aider les enfants présentant ce genre de profil. Il peut être intéressant de se rapprocher d’une association de parents d’EIP pour trouver les bons opérant à proximité.

Le diagnostic est le début d’un cheminement, d’une aventure familiale, hélas pour beaucoup d’enfants l’histoire s’arrête là, avec acronyme obscur et aucun outil ni aide pour la famille comme pour l’enfant. Des fois l’enfant va se sentir enfermé et coupé des autres, il est juste à part et il a toute une collection de problèmes.

Ressemblance / différence avec les TDHA

à l’instar des élèves présentant un trouble de l’attention avec ou sans hyperactivité(attention il existe bien des profils différents de TDHA) il peut se montrer particulièrement rêveur en classe mais ce n’est pas à cause d’un problème hormonal mais purement pratique, il a vite compris ce qui était dit, prévois la suite et s’il n’a pas développé certaines habitudes d’approfondissement et de connexion il se retrouve vite à s’ennuyer. Il a un esprit affamé qui demande à être nourri. Le diagnostic d’un TDHA relève plus d’un psychiatre (et non d’un psychologue) ayant éventuellement accès à de l’imagerie médicale permettant de montrer les lacunes de fonctionnement du cerveau. (pour en savoir plus, je vous invite à consulter la synthèse que j’ai rédigé à ce sujet ici sur ce site)

Astuce pour le professeur

Ce qui suit est une série de pistes qui peuvent être profitables si l’élève présente un profil en adéquation avec les besoins qu’elles couvrent. Les fulgurances et l’intuition permettent aux EIP de bien s’en sortir scolairement jusqu’à ce que les exigences de rédaction les stop tout net. Comme beaucoup d’élèves performants aux collèges qui s’en sont toujours sorti en évitant de travailler, le jour où ils arrivent au bout de leurs limites est à surveiller de près. Ce virage s’il est mal négocié peut briser l’élève et son rapport avec la matière “qui le met en difficulté”.

Pour l’aider à prendre la rédaction et sa capacité à tisser un raisonnement en enchaînant les arguments au sérieux en plus de lui rappeler leur intérêt, on peut surtout l’amener à tutorer / écrire des exposés, et donc à être confronté à l’autre sa différences, ses besoins, et la limite d’une communication basée sur un fantasme d’entourage constitué de clones comprenant ses évidences.

Astuces pour l’élève

            pour gérer sa bougeotte intellectuelle, il peut être intéressant pour lui de s’agiter de manière productive :

intellectuellement : en essayant de voir comment se connecte ce qui est entendu en classe avec le reste des expériences passées et autres connaissances. Adopter un regard critique et traquer les failles dans le discours, puis les failles dans les failles (contre argument…)

laisser parler sa créativité dans des travaux d’invention (ateliers d’écriture, peinture, musique) ou tout simplement pour s’inventer des histoires permettant de relier les points du cours, et même les points entre les cours (ça aidera à s’intéresser et à mémoriser)

physiquement : avoir la possibilité d’utiliser une feuille de brouillon en sous main pour pouvoir noter les idées passant par la tête (et ainsi les en sortir et éviter de faire une fixation sur elles)

être EIP s’est souvent mis sur son chemin et l’a gêné dans son développement social et scolaire et on pourrait presque considérer cette condition a-normale comme un handicap. Il se trouve que ce décalage peut être une force et il est important d’étayer l’enfant pour qu’il puisse s’en rendre compte. Qu’est ce que ses particularités lui permettent de faire mieux que les autres ? Où sont ses forces ? Celles-ci doivent être mises en avant et servir de moteur pour traîner le reste, le temps que les endroits fragiles puissent être accompagnés, fortifiés et rendus pleinement fonctionnels. 

Dispositif d’aide aux EIP (au lycée Albert Einstein)

            C’est avant tout un tutorat avec une personne sensibilisé avec les problématiques des EIP. A priori n’importe quel professeur familiarisé peut suivre un EIP. Si l’expertise est un plus certain, il y a d’autres facteurs à prendre en compte qui souvent peuvent primer comme l’empathie et la compatibilité d’humeur avec l’élève. Si en tant que professeur le but n’est pas de faire de la psychothérapie mais de l’amener à optimiser son passage par la classe, pour des élèves aussi sensibles un tel objectif passe souvent par un retour à la paix avec soi-même, le groupe classe, l’équipe pédagogique, et le concept d’école. Ça peut donc passer par des séances avec beaucoup d’écoute, de reconnaissance, un pan humain qui sera équilibré par des une vision générale et une fermeté bien jaugée dans le guidage.

            Ce dispositif se concentre sur :

  • La gestion des émotions (stress, anxiété de performance) au travers de techniques cognitive ou corporelles (avec Sylvie)
  • La gestion du mental en classe et ailleurs (comment rester investi et augmenter la rétention d’information)
  • motivation / remotivation (arriver à l’aider à tenir le temps d’assurer la transition une peu chaotique et douloureuse entre de bons résultats par facilité scolaires à bons résultats obtenus grâce au travail)
  • aider l’élève à trouver sa place dans le groupe classe/ au lycée.
  • aider l’élève à organiser son travail.

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