Pour une spiritualité vivante

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Mise au point : par spiritualité j’entends vis de l’esprit que celle-ci soit religieuse ou non, j’y inclus donc la philosophie, la psychologie, la culture, …
         Il y a être croyant et il y a être fanatique. Pour moi s’il n’y a pas une lutte permanente avec l’ange, un jeu avec le livre, la foi devient ce poids mort qui vous entraine dans l’abime du fanatisme.

Aime ta droite (si tu veux être un Homme entier)

Je discutais récemment avec un de mes oncles, un activiste politique tendance gauche/écolo, engagé dans moult associations culturelles. Je peinais à expliquer mon positionnement politique et je ne sais pas par quel jeux d’association d’idée je lui ai dit que j’avais un couple d’amis à droite. Il s’est montré des plus étonnés et m’a demandé, comme si c’était la chose la plus incroyable du monde, si c’était réellement des amis et pas juste des potes, et si j’ai maintenu ma position, à l’intérieur je me suis sentit ébranlé. Devant le regard inquisiteur de mon oncle, une partie de moi avait envie d’abjurer cette amitié scandaleuse. J’ai cherché et trouvé des raisons pour la diminuer : ils ne font partie de mon cercle le plus intime, physiquement ils sont à des centaines de kilomètres et nous n’avons pas eu l’opportunité de nous voir depuis un bon moment mais, tout de même en écoutant mon cœur, j’y ai trouvé beaucoup d’amour et de respect pour ce couple.
Mouvement de pendule inverse, je me suis sentit en colère, contre moi, pour avoir eu ce moment de lâcheté, ce moment de doute, et aussi contre mon oncle pour la pression implicite qu’il avait exercé à mon encontre. Le type, qui dans ses tendres années avait été maoïste se permettait de critiquer (sans un mot, mais tout de même) mes fréquentations et mon alignement politique. Mao le grand timonier, qui pour des raisons qui échappent à mon entendement n’a jamais été jugé pour crime contre l’humanité pour un bilan quelque part entre 45 millions et 72 millions de mort. Les bras m’en tombent, ce genre de comportement c’est comme… c’est comme si un type après avoir été maoïste se permettait de faire des leçons de morale… non désolé, c’est tellement grave qu’aucune analogie ne peut fonctionner.
Quand la conversation s’est passée je me voyais à gauche, politiquement, culturellement, esthétiquement, pour être plus précis, vivant à l’heure américaine (dans ma tête en tout cas) je me voyais comme un démocrate, j’étais fan de Bernie Sanders. Les républicains étaient stupides, un tantinet racistes, va-t’en guerre. Je le croyais de tout cœur. Pourquoi en douter alors que toutes les stars d’Hollywood ne cessent de le répéter, alors que tous les universitaires (sauf une minorité toujours plus restreinte) sont de gauche etc…
Et là toujours très énervé contre mon oncle j’ai commencé à regarder d’un peu plus prêt mon positionnement ainsi que la manière dont je gérais les informations divergentes. Quand je voyais les post à droites de mes amis sur facebook, je réalise que j’avais une attitude condescendante, genre, ah les pauvres s’ils savaient. C’étaient mes amis et je leur pardonnais leur aveuglement. Il n’y avait aucune analyse de ce qu’ils disaient, c’était automatiquement rejeté car « complètement ridicule ». J’ai réalisé à ce moment-là que même si je n’étais pas sur les barricades, même si je ne levais jamais la voix dans les conversations politiques, j’étais un fanatique de gauche.
Le problème n’était pas d’avoir des convictions mais se situait dans l’incapacité d’entendre l’autre et ses arguments.
Cette réalisation a été dure à encaisser surtout que vu ce que j’avais pu vivre dans ma jeunesse j’avais été plus que mis au courant des conséquences d’une attitude sectaire.   

petite minute pub pour mon second roman

Je suis né et j’ais été élevé dans la foi des Témoins de Jéhovah (situation commentée à l’envie dans mon second roman voir le lien ci-dessus). Tout d’abord bon petit croyant à sa maman j’ai pris ce que l’on m’offrait au pied de la lettre, puis le « monde » comme ils aiment appeler l’ensemble des gens qui n’ont pas accepté l’unique foi valable) est venu frapper à ma porte. 
Etre témoin de Jéhovah c’est vivre en état de siège, être pris dans un jeu à somme nulle, dans chaque échange, c’est soit le bien qui gagne soit c’est le monde. Le témoin de Jéhovah se doit de prêcher, de partager « la vérité », mais ce n’est pas un échange, c’est une discussion à sens unique. Toute objection en face sera contrée par une réponse toute faite, et si la conversation se poursuit mais que l’on se retrouve à court d’argument, l’union fait la force et on passe le relai à quelqu’un de plus aguerri dans la foi. En dehors de la prédication, cette une guerre de conquête spirituelle, le témoin de Jéhovah doit fermer ses écoutilles autant que possible et limiter l’exposition à des idées corruptrices. Il doit éviter d’être proche de personnes du monde pour éviter qu’un levier émotionnel ne favorise la contamination.
Vu de l’extérieur une telle organisation peut paraitre atroce, non ?mais si on regarde bien, ce qui est réellement atroce c’est le fait que les principes qui sont prêché, ses principes qui sont inconscient ou larvés chez tout un chacun, soit embrassé aussi ouvertement par ces gens sans que cela suscite en eux tout un lot de question. 
Je suis peut-être un peu injuste, ces questions légitimes remontent souvent à la surface mais elles sont accueillie avec des réponses prémâchée, un ou deux versets savamment interprétés et voilà si c’est dieux qui l’a dit, c’est que c’est vrai, point barre. Généralement le jeune témoin de Jéhovah ayant posé ces questions finit par lâcher l’affaire, souvent, pour ne pas faire de vague, il accepte une réponse qui souvent ne le convainc qu’à moitié. Comment fait-il ? Pour rester lui-même, et bien il s’ampute de cette partie qui doute, il la verrouille à l’extérieur, il se crève un œil.
Pour moi le fanatisme commence à ce moment-là, quand pour une raison ou une autre on jugule le doute, la pensée dissidente, la vie en somme. La vérité est vécue comme quelque chose d’absolu et de statique, elle est vue comme minérale et intransigeante.   
         Le fanatisme nous guète il est partout autour de nous, pire encore, il s’est offert une place de choix dans notre cœur.
         Pour Platon il y a un monde au-delà du notre, un monde d’idées pures et parfaites. Un monde qui se refuse à nos sens grossier, pour lui nous sommes ces hommes condamnés à regarder les ombres projetées du monde sur la parois de notre caverne. Ces idées ultimes existent et elles sont indiscutables, le beau, le bien, le mal, l’utopie chère au communiste, l’éducation parfaite chère à rousseau, celle qui ne détruirait pas la nature bonne est parfaite des petits enfants. Si elles restaient de belle théories pour profs de philo fumant la pipe dans un gros fauteuil au pied d’une cheminée crépitante ça ne serait pas un souci, le problème c’est que de temps en temps des prophètes émergent et viennent incarner d’un ton péremptoire ces vérités éternelles. Leur parole sera acceptée comme vérité ou pas, le monde se scinde en deux, les croyants et les autres. Il n’y a pas de discussion possible, car ces concepts échappent aux sens et à nos esprits grossiers. La lutte peut commencer.
         Heureusement la philosophie ne s’arrête pas à Platon, Aristote ami et pendant un temps disciple de Platon va proposer une approche radicalement différente, une approche qui révolutionna le monde, une approche qui tantôt en complément, tantôt en opposition avec la judéo-chrétienté est devenu la colonne vertébrale de l’occident. Il est celui qui a théorisé l’approche empirique, l’approche scientifique. Les catégories, les concepts seront approchés à travers l’observation et les déductions, certes on va se tromper encore et encore, mais à chaque fois on va perfectionner un peu plus notre compréhension du monde. Dehors les prophètes, dehors les prêtres) de toute façon.
         Je pense qu’il y a de la magie ici-bas, et que certaines choses de l’ordre spirituel semblent inaccessibles à nos sens, mais pour ce qui est de la démarche, l’approche aristotélique s’impose. La vérité n’est pas un trésor auquel il faut s’accrocher, une place forte qu’il faut défendre bec et ongle, mais une destination lointaine, sans doute inaccessible de notre vivant, mais qui donnera une direction voir un sens à notre vie.
Et concrètement cette quête de la vérité ça se fait comment ?

Statique et dynamique

         L’idée n’est pas de se balader d’un pied léger, et de faire du lèche vitrine, détaillant les croyances et les idéologies puis rentrer chez vous très fier de votre neutralité. En fait cet « objectivité » est un piège double, elle est soit fausse et relève d’un manque de connaissance de soi. On a une foule de préjugés dont beaucoup inconscient et sans exploration on peut les ignorer se croire au-delà de toute subjectivité, ou pire encore faire nos choix sur une base purement rationnelle.
         Deuxième partie du piège de la neutralité, on peut se croire au-dessus du débat, ce qui s’accompagne souvent d’un peu de nihilisme au premier degré : « de toute façon, tous pourris » ou spirituel : « de toute façon à l’échelle de l’éternité et de l’univers, quelle importance ? », « l’essentiel est de travailler sur mon âme immortelle, ces débats puérils ça n’est pas pour moi. » On se retrouve à vivre perché, déconnecté de notre plan d’existence, ce qui même d’une perspective spiritualiste est catastrophique : si on s’incarne dans un corps humain c’est pour faire l’expérience de l’ici-bas, ici et maintenant, pas pour jouer aux anges et aux esprits désincarnés.
On a besoin d’une certaine gravité, d’un engagement, on a besoin d’y croire de tout notre cœur et de toute notre âme…. et ceci pendant un temps… et ce n’est qu’après avoir occupé un lieu mental qu’on pourra se déplacer et aller ailleurs. Le changement n’a pas besoin d’être radical, d’être la bascule d’une extrémité à l’autre : chrétien / athé, PC / FN etc non, il n’a pas besoin d’être traumatisant. Pour cela il faut pratiquer le débat d’idée, mais le débat amical et respectueux, chercher des adversaires civilisés, courtois, rationnel et surtout solide intellectuellement parlant. C’est comme jouer au tennis, on ne va pas progresser si on joue contre des brèles, le meilleur moyen c’est de pratiquer contre des gens qui nous sont légèrement supérieurs. Ça nous affute, et nous permet de prendre conscience des limites de notre état actuel.
Et où est ce qu’on les trouve ces adversaires intéressants ? Effectivement alors qu’on a tendance naturellement à s’enterrer dans le consensus, entouré de gens qui n’ont pas une grande variance question croyance, ça ne reste qu’une tendance. Il y aura nécessairement des personnes d’autres bords autour de vous. Mais est ce qu’elles sont aussi intelligentes et respectueuse ? C’est peut être beaucoup demander.
On peut très bien avoir envie de s’ouvrir sans nécessairement quelqu’un avec qui débattre ou tout simplement manquer l’énergie pour avoir ses longues conversations. Vous êtes de gauche, cherchez les meilleurs écrivains, sociologues, psychologues, philosophes orientés à droite, puis cherchez un de leurs livres/ vidéo Youtube et dégustez. Dans un deuxième temps traquez les forums. Si vous venez de regarder une vidéo Youtube la section commentaire est juste en dessous, pour ce qui est des livres, vous pouvez regarder ce qu’on en dit sur la partie commentaire d’Amazon… mais, à moins que vous ne preniez le temps de faire votre propre chronique ça manque toutefois d’interactivité. Vous pouvez chercher des articles sur internet sur le livre en question, puis regarder dans la section commentaire les réactions suscitées par l’œuvre et par le compte rendu du « chroniqueur ». Lancez-vous, interagissez, vos adversaires se feront un plaisir de pointer les failles dans votre pensée.
Quand les débateurs se préparent, ils ne se concentrent pas juste sur le message qu’ils comptent faire passer, mais aussi sur les attaques auxquelles ils devront répondre. On peut en faire de même, changer de position perceptuelle et se mettre dans la peau d’un opposant, regarder nos affirmations de l’extérieur, cherchez la faille, le danger d’une telle ligne de pensée, quelles sont les prémices un tantinet discutables. Le but n’est pas de se contenter dans le moment d’après de trouver comme le débateur des petites vannes ou des solutions simplistes mais de faire un travail honnête. Est-ce que  notre modèle est toujours valide (une petite rustine suffit à gérer le problème), ou est ce qu’il est temps de passer à quelque chose de plus général. Les physiciens sont passés successivement par toute une série de modèle pour décrire la matière, et actuellement, humble et généreux ils se reconnaissent dans une impasse. Ils connaissent les limites de ceux qu’ils continuent à utiliser faute de mieux, mais savent qu’un autre modèle conciliant les limites et contradictions des anciens reste encore à trouver.  
Partir pour ne jamais revenir.
           Dans une société souvent tribale, voir sa ligne de pensée changer met à mal nos amitiés. Allez dire à vos amis à l’église que ça y est vous êtes athé… allez dire à vos amis profs que maintenant vous allez voter à droite… et regardez ce qui se passe. Pas très cool, non ? C’est le moment de faire un choix, et de se demander si vous êtes prêt à vous crevez les yeux et les tympans, à marcher droit dans l’orthodoxie de votre milieux , à bien faire attention à ce qu’aucune de vos paroles ne dépasse pour garder des amis qui sans cela vous vomiraient dessus ? En fait la question est bidon, la vrai question est :« Est-ce que vous avez réellement le choix ? »

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