Balade dans le monde des esprits, Partie III : la restauration de l’âme.

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Dans tous les pays du monde depuis les débuts de l’humanité il existe des praticiens qui soignent en utilisant les forces de la nature qu’elles soient visibles ou non. En occident après presque deux millénaires d’oppression chrétienne suivi par une approche scientifique particulièrement matérialiste ces pratiques ont été poussées dans le maquis. Dans les coins les plus reculés du monde, elles ont été mieux préservées car intrinsèquement liées aux traditions séculaires de ces pays, traditions à préserver faces aux campagnes répétées d’évangélisation qu’ils soient religieux, scientifiques, culturels et économiques. A partir de la deuxième partie du XXème siècle, des anthropologues occidentaux se sont passionnés pour ces pratiques. Ils les ont étudiées de manière rigoureuse, et ont trouvé au-delà de formes variant selon les pays et continents un fond commun très riche. Ils ont étudié ces pratiques dites chamaniques avec une certaine distance objective si ce n’est pour une poignée d’entre eux qui ont décidé d’arrêter les mesures objectives pour en faire l’expérience intime.

D’observateurs ils sont devenus croyants et pratiquants. Carlos Castaneda est le plus connu d’entre eux. Ses livres, de véritables best sellers offrant un compte rendu évocateur de son parcours et ont passionné la jeunesse occidentale. Ses textes sont passionnants, mais les racines anthropologiques sont vite délaissées au profit d’une approche plus intime et métaphorique. Lire ses livres ouvre des portes, ça offre un rêve, un rêve d’un monde plus vaste caché derrière nos quotidiens mécaniques, mais ça ne donne pas vraiment de clé sur la manière d’y accéder.

Depuis le succès de ces livres les chamanes du monde entier ont vu débarquer des hordes de jeunes occidentaux voulant faire les expériences décrites dans ces pages. Du monde entier, peut-être pas. En fait si ces chamanes se baladent tous dans la réalité non ordinaire durant leur traitements/cérémonies, en dehors des traditions sud-américaines rares sont celles où le patient/client est partie prenante de l’expérience et peut rejoindre le guérisseur dans son trip à l’aide de psychotropes.

Le principe général de leurs soins est le suivant : à l’aide d’un rythme battu sur un tambour ou de substances hallucinogènes le chamane (j’utilise dans cet article le masculin mais il y a des chamanes des deux sexes) sort de la réalité ordinaire pour aller se balader dans des espaces intimes, le leur ou celui de leurs clients. Là, aidés des esprits (se manifestant généralement sous la forme d’animaux guides) ils vont agir dans ces espaces poser des actes qui vont changer les patients de l’intérieur. Parmi les actes proposés, il y a le nettoyage de traumas, des exorcismes et la restauration de l’âme. C’est cette dernière pratique qui va nous intéresser maintenant.

Carlos Castaneda n’est pas le seul universitaire à avoir sauté la barrière. Michael Harner lui, a étudié, comparé, vécu, pratiqué et adapté les techniques chamaniques à notre monde moderne. Ce qu’il propose est moins coloré, moins authentique mais d’une grande profondeur et d’une efficacité redoutable. Sandra Ingerman, sans doute la plus connue de ses élèves a écrit de nombreux ouvrages dont un consacré à la réparation du soi fragmenté.

 Dans la tradition chamanique, une personne peut voir son âme se briser et certaines parties être laissées derrière. Soumise à un trauma, elle peut inconsciemment choisir de laisser une partie d’elle derrière pour survivre et être capable d’aller de l’avant. Dans certaines circonstances, quand il y a dans des relations intimes (famille, amitié, amants) des phénomènes d’emprise assez fort la personne peut aussi inconsciemment une fois de plus accepter d’abandonner une partie d’elle, comme un os à ronger pour la personne possessive. Ces actes dictés par l’instinct de survie, étant inconscients ne sont généralement pas remis en cause par la suite, et donc longtemps après que les relations et les situations traumatisantes soient arrivées à leur terme ces personnes continuent leur route… incomplètes.

Le soin ressemble à une exploration de la réalité non ordinaire (un espace métaphorique très subjectif) où guidé par son intuition et ses esprit le chaman va trouver le morceau manquant souvent sous la forme d’une réplique du client au moment où il a perdu une partie de lui-même. Généralement elle est retrouvée au milieu d’une scène réaliste ou métaphorique donnant au chaman une idée des circonstances dans lesquelles le choix a été fait. Il s’en suit une négociation avec la partie laissée derrière ou avec la personne qui l’a volée, puis quand le chaman a trouvé un consensus il reviendra à la surface accompagnée de la partie et une fois dans la réalité ordinaire elle fera un acte symbolisant la réunion (comme souffler l’âme au niveau du chakra cardiaque, puis au niveau du coronal).

Cet acte majeur est le début de l’aventure. Le morceau réintégré doit trouver sa place dans une psyché qui a appris à vivre sans lui et qui l’a fait pendant de nombreuses années. La partie réintégrée porte une sensibilité que l’on avait perdue, qui va enrichir l’éventail de nos possibilités mais qui peut aussi provoquer des conflits avec nos habitudes. Imaginez que retrouvant l’odorat vous commenciez à vous rendre compte qu’il y a des pièces dans votre maison et des gens dans votre vie qui sentent sacrément mauvais. Gagner en clarté sur qui on est et ce que l’on veut n’est pas nécessairement de tous repos.

Est-ce qu’il est nécessaire de passer par un shaman pour réintégrer ces parties dont on s’est retrouvé dépossédé ? Il semblerait qu’avec des thérapies verbales et comportementales on ne puisse pas reproduire ces résultats mais William Baldwin, a trouvé le moyen de faire quelque chose d’équivalent sous hypnose. La connexion entre le chamanisme et l’hypnose symbolique est assez évidente. Avec les deux approches, la personne en transe va pouvoir se balader dans une représentation métaphorique de son intérieur, et le travail sur ces images va reconditionner l’inconscient de la personne. L’espace visité sous hypnose et les mondes magiques et haut en couleur du chaman sont des métaphores dictées par l’inconscient « rêveur » et structurées par sa personnalité et ses croyances. On y retrouvera des symboles universels et d’autres beaucoup plus personnels, mais ça n’est pas un frein au travail car celui-ci n’est pas analytique, on ne cherche pas à faire sens, ou en tout cas pas au moment d’agir.

L’hypnothérapeute, à la différence du chamane n’aura généralement pas d’aide surnaturelle. Il va devoir explorer les symboles en solo, écouter les paroles des parties désireuses de s’exprimer, et avec un peut de bon sens et une dose d’intuition (la sienne comme celle de l’inconscient de son patient), il va trouver un compromis respectueux de toutes les parties. Finalement ça n’est pas sans rappeler les travaux de recadrage popularisés par la PNL (dans une version un peu trop rigide à mon gout) ainsi que les travaux d’exploration et de résolution oniriques de Randall Churchill (becoming the dream) qui seront intéressants pour tous les clients allergiques au surnaturel.

En dehors de l’hypnose et du chamanisme il y a toute fois d’autres approches pour récupérer les parties manquantes. Les thérapeutes travaillant avec les esprits peuvent souvent se passer de transe pour demander assistance à ces derniers. Ils peuvent leur demander d’aller chercher les fragments éparpillés, de négocier et de procéder à la réintégration ainsi que récupérer des conseils pour l’intégration psychologique de la partie dans la vie de tous les jours.

Pour aller plus loin

Le livre séminal de michael harner :

Le livre de sandra ingerman spécialement centré sur le sujet de l’article :

Un bon livre de carlos Castaneda, ce n’est pas le premier de la série (L’herbe du diable et la petite fumée) mais c’est là où pour moi ça décolle

Un livre plutôt intéressant où un hypnothérapeute explique comment il a intégré les vies antérieures, les exorcismes et le recouvrement de fragment d’ame dans sa pratique

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